vendredi 4 septembre 2015

lettre-courriel aux parlementaires - diffusée en même temps que celle, retenue, en date du 18 juin dernier


Chers élus de la nation,

je continue cette réflexion – à l’anniversaire de la République, qui coincidait en 1870 avec l’échec d’une forme institutionnelle pourtant très moderne pour l’époque et à laquelle la Cinquième du nom ressemble beaucoup, et plus encore avec une situation apparemment désespérée en relations internationales et en cohésion du pays, de ses élites, de son peuple : il y aurait bientôt l’amputation de notre territoire, lequel constitue notre premier patrimoine commun, et la Commune, affreuse mais si explicable.

Comme à cette époque, il s’agit pour nous de trouver le meilleur régime politique et social – qui prime et encadre notre vie économique et intellectuelle aujourd’hui caractérisée par le mépris du salariat et du service public, l’adoration de l’argent et de la rentabilité (du profit et de son accaparement), l’individualisme, la dislocation de toutes les solidarités, à commencer par celle du couple. La réforme intellectuelle et morale selon Renan, la philosophie très réaliste du suffrage universel selon Victor de Broglie, pour la France nouvelle selon Prévost-Paradol. L’époque avait suscité journaux et écoles, vénérables, et malgré des institutions monistes et d’intenses conflits structurels tels que la relation entre l’Eglise et l’Etat ou entre la justice et l’armée, de grandes autorités politiques et morales avaient surgi. Un culte pour le pays, le voyage de deux enfants à travers la France, une géographie répandue comme l’enseignement de notre histoire, de notre identité et une assimilation mutuelle qui poroduisit notre capacité à tenir le choc de 1914 et l’occupation destructrice d’une partie considérable de notre territoire en superficie et en ressources.

Aujourd’hui, l’Etat a disparu sauf le fisc et le maintien de l’ordre contre les manifestants : les scandalisés, les mis à la rue ou à la pauvreté. La politique semblait depuis longtemps une classe à part, mais depuis peu elle est devenue un gouvernement à l’encontre de nous et subordonné à des emprises ou à lui-même, en sorte qu’il n’a plus de légitimité. Nous ne tenons donc plus aucun choc. Et personne n’émerge du flot des mauvaises nouvelles, des pratiques sans résultats.

J’ai eu l’honneur d’une intimité communiante avec deux personnalités qui ont démontré – à longueur de vie : l’Abbé Pierre, par une fulgurance au Quai d’Orsay – qu’on peut changer les choses en galvanisant les esprits, en n’étant que soi-même, sans vulgarité ni démagogie, sans slogans ni simplismes. Vous-mêmes dans les circonscriptions dont les citoyens et les habitants vous portent au siège qui est le vôtre pour cette législature et depuis plusieurs autres déjà – sans doute – vous avez l’expérience de la décision collégiale, des débats en mairie, en assemblée locale, l’expérience des consultations organisées ou selon vos rencontres ou les appels qui vous sont faits. Les initiatives, les votes ne sont pas ceux d’une contrainte. Vous savez ce que produisent l’imagination ou la relation de confiance personnelle. Vous êtes entourés de dévouements précis et le plus souvent désintéressés. Les Français, vos électeurs le savent, tandis qu’au niveau national l’élection est celle de l’espérance et la durée du mandat celle où se découvrent quelques personnalités de plus en plus dominées  par l’obsession de rester en place. D’y être renouvelées. Nous devenons médiocres et simplistes parce que nos dirigeants en politique, en entreprise, en intelligence de notre temps ne veulent pas que nous nous mêlions d’exercer avec eux le pouvoir, de trouver avec eux les bonnes solutions, de choisir avec eux ce qui doit rester notre structure. Notre âme se perd – découragement, fatalisme, cynisme – parce que le système est rigide et qu’il ne promeut que des esprits se croyant de droit divin.

Le président de la République n’est pas contrôlé. Les ministres sont – à quelques exceptions près que vous connaissez bien – plus accaparés par une parole publique d’ailleurs floue et approximative, que par l’étude de fond des questions à résoudre.

Ce n’est ni la France, ni la République. C’est un déclin sans précédent en temps de paix.

Vous composez une institution décisive pour notre avenir et vous pouvez décider de celui-ci en déclarant votre indépendance de jugement et de vote, en refusant – pour le salut public – l’argument peu démocratique qui gouverne (vous le vivez) les partis et les assemblées plus que jamais et alors que tous les dangers sont là, tous les écroûlements en cours : l’argument de faire corps pour ne pas perdre la prochaine élection, quelle qu’elle soit. Le rassemblement, l’union… alors qu’il nous faut discernement et énergie. Le point de départ et celui de l’arrivée ne sont pas, en contrainte de conscience, le soutien impopulaire de soi-disant réformes-catalogues défaisant le peu de cohésion qu’il nous reste. Ils sont la démocratie et l’appui de tout gouvernement sur un peuple d’expérience et de maturité. Nos gouvernants depuis au moins vingt ans font de la pédagogie – prétendent-ils – imposant ainsi une soi-disant supériorité de savoir et de compétence que n’auraient pas les Français, en corps et individuellement. Cette supériorité a montré qu’elle n’opérait aucun heureux résultat dans un pays de plus en plus malmené et ne se reconnaissant plus ni en son art de vivre et de produire, ni en son aptitude à la grandeur et à l’enthousiasme.

Il nous faut sortir de cette spirale, casser la répétition d’exercices de plus en plus vains et le moule fabriquant des dirigeants qui n’encourent aucune sanction quand ils échouent. Or, ils échouent et la prochaine élection présidentielle sera le « copier-coller » des précédentes. Cette élection doit être servante du bien commun par les réflexes et les comportements qu’elle peut engendrer parmi nous. L’élue ou l’élu sera secondaire.

Votre lecture et votre réaction m’honoreront et me seront précieux.

Dans l’attente de vous lire, d’échanger avec vous, de vous rencontrer éventuellement, je vous assure de ma confiance intuitive en votre liberté de jugement par expérience.

vendredi 4 septembre 2015

Pièces jointes

- un rappel biographique
- quelques citations de deux de nos grands contemporains pour ce que doit être, en forme et en fond, la politique quand le pays doit faire face

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